
Ce dispositif reproduit fidèlement l'expérience du Tamagotchi original de Bandai avec ses trois boutons permettant de nourrir, jouer et nettoyer son compagnon numérique. Les statistiques de bonheur, santé, nourriture et poids évoluent selon les interactions, et comme dans la version d'origine, la négligence conduit à la mort virtuelle de l'animal, symbolisée par une pierre tombale sur l'écran TFT.
Une technologie sophistiquée au service de la physique virtuelle
L'innovation réside dans l'intégration d'un accéléromètre couplé à une simulation physique avancée basée sur les travaux de recherche de Maciej Matyk datant de 2004. Le système utilise les deux cœurs d'un Raspberry Pi Pico : l'un entièrement dédié aux calculs de physique des corps mous, l'autre gérant les entrées, l'affichage et la logique de jeu.
Cette architecture permet à l'utilisateur de secouer l'appareil pour faire rebondir virtuellement son animal domestique contre les parois de son environnement numérique. La créature, représentée par un anneau de sommets connectés par des ressorts virtuels, se déforme de manière réaliste lors des impacts tout en conservant globalement sa forme sphérique grâce à la simulation de pression interne.
Comme l'expliquent les créatrices sur leur site web dédié : "La créature est représentée par un anneau de sommets, avec des sommets adjacents connectés par des ressorts. La pression interne, responsable du maintien de la forme globalement sphérique de la créature, est dérivée de sa surface actuelle."
Un écosystème créatif autour des projets électroniques
Ce type de projet s'inscrit dans une tendance plus large de détournement créatif des technologies. La communauté des makers a développé de nombreuses variations autour du concept d'animal virtuel, souvent basées sur des plateformes comme le Raspberry Pi.
La scène française du retrogaming DIY n'est pas en reste, comme en témoignent les nombreux projets documentés sur notre site, qui couvre régulièrement l'actualité des créations basées sur ces nano-ordinateurs. Les passionnés y trouvent notamment des guides pour créer leurs propres consoles rétro ou bornes d'arcade miniatures à l'aide d'imprimantes 3D et de cartes Raspberry Pi.
Persistance des données et perfectionnements techniques
L'équipe a particulièrement soigné l'aspect technique de leur création. Le système sauvegarde automatiquement l'état de l'animal virtuel dans une mémoire FRAM externe, permettant de retrouver son compagnon dans l'état exact où on l'avait laissé après chaque redémarrage. Cette fonctionnalité garantit une continuité de l'expérience utilisateur, caractéristique essentielle des Tamagotchi originaux.
Les étudiantes ont également développé des algorithmes graphiques spécialisés : tracé de lignes avec épaisseur variable, rendu de polygones, et système d'animation permettant de contrôler facilement les expressions faciales de la créature virtuelle. L'optimisation des performances a été une préoccupation constante, avec un affichage cadencé à 30 images par seconde et des mises à jour partielles de l'écran pour économiser les ressources.
Une réflexion sur l'interaction homme-machine
Au-delà de l'aspect ludique, ce projet interroge notre relation aux objets numériques et aux simulations. Le nom provocateur "Torture Chamber" soulève des questions sur l'empathie que nous développons envers des entités virtuelles, même rudimentaires. Cette dimension psychologique était déjà présente dans les Tamagotchi originaux, qui avaient généré chez certains utilisateurs un sentiment de responsabilité réelle envers ces créatures artificielles.
Rhea Goswami, l'une des créatrices, étudie l'informatique et l'ingénierie électrique à Cornell. Passionnée par les systèmes embarqués et l'optimisation combinatoire, elle dirige également l'équipe systèmes intelligents du groupe Cornell University Unmanned Air Systems (CUAir). Cette expertise technique transparaît dans la sophistication de l'implémentation physique du projet.
Le Tamagotchi Torture Chamber illustre parfaitement comment une génération formée aux technologies numériques réinterprète les objets de son enfance. En combinant nostalgie, humour noir et prouesse technique, ces étudiantes créent un pont entre le passé analogique et les possibilités infinies du numérique contemporain.
Sources : Hackaday, ECE4760 Cornell, Boing Boing, Cybernews
Tags : Tamagotchi - Raspberry Pi